Le texte qui suit a été écrit par l’un des co-fondateurs du mouvement étasunien d’écologie profonde Deep Green Resistance. Nous l’avons trouvé particulièrement à propos.
« Il existe une idée fausse très répandue sur la façon dont Hitler a fait accepter ses plans, y compris l’Holocauste, et sur la façon dont il a mené une guerre offensive que les Allemands n’ont jamais pu gagner.
Les films nous ont fait croire que quiconque refusait de suivre les plans d’Hitler était envoyé sur le front de l’Est et risquait la mort.
Ce n’est pas vrai du tout. Normalement, la menace était que s’ils ne suivaient pas ses plans, ils ne recevraient pas de promotion. En d’autres termes, leur principale crainte n’était pas de mourir, mais de perdre leur emploi ou de ne pas être promus.
En fait, de nombreux membres de la base du parti nazi ont adhéré non pas parce qu’ils étaient d’accord avec l’idéologie, mais parce que certains emplois, par exemple des emplois d’ingénieurs, n’étaient accessibles qu’aux membres du parti nazi.
En d’autres termes, ils ont rejoint le parti parce qu’ils ne voulaient pas perdre leur emploi ou parce qu’ils voulaient en trouver un.
Bien sûr, cette histoire n’est pas seulement vraie pour ceux qui vivaient sous le régime nazi. Cette même motivation explique le silence de la plupart des gens face à l’injustice. Et bien sûr, cela fait partie de ce dont parlait Upton Sinclair lorsqu’il a écrit :
“Il est difficile de faire comprendre quelque chose à quelqu’un quand son salaire dépend du fait qu’il ne la comprenne pas.”
Cette note s’adresse donc à tous ceux qui disent : “Je ne peux pas parler parce que si je le fais, je vais perdre mon emploi.” Vous êtes nombreux dans ce cas. Oui, nous savons tous que, comme je l’ai lu dans un roman à suspense ou un autre, “Le premier qui passe la porte se fait toujours tirer dessus”, ou peut-être plus exactement, “Le premier qui s’exprime contre l’injustice perd son emploi”.
Mais ceux qui sont les premiers à franchir la porte, ceux qui prennent une balle pour la cause, ceux qui parlent les premiers, ceux qui mettent leur carrière en danger, ne doivent pas être laissés en plan. Après le premier qui passe la porte, il faut qu’il y en ait un autre, et un autre encore. Après la première personne qui parle, il faut qu’il y en ait une autre, puis une autre.
Ne laissez pas les courageux en plan.
Rejoignez-les. Prenez les risques qu’ils prennent.
Et si c’est trop effrayant, lisez le roman Lord Jim, de Joseph Conrad. Il s’agit de quelqu’un qui a manqué de courage et qui n’agit pas comme il le devrait, et qui transforme ensuite le reste de sa vie en un énorme acte de rédemption pour sa lâcheté momentanée. Lisez-le. Lisez-le à nouveau. Et ensuite, agissez dans le monde réel.
Il n’est jamais trop tard pour prendre son courage à deux mains. Il n’est jamais trop tard pour franchir cette porte. Il n’est jamais trop tard pour parler. Il n’est jamais trop tard pour trouver son courage. »
— Traduction d’un texte de Derrick Jensen, publié le 1er février 2020. L’original est disponible ici.